Etape 77 - MSK Gand - Les grandes heures de la peinture flamande
Mercredi 5 février 2019. La visite se poursuit par Portrait de famille, de Cornelis de Vos (1635). Cornelis de Vos, un contemporain et ami de Rubens, travailla dans divers genres. Son talent s’exprime toutefois surtout dans les portraits de bourgeois qu’il réalisa entre 1620 et 1640. Ce portrait de famille montre qu’il est maître dans la composition de portraits de groupe et la représentation d’enfants. C’est un des premiers artistes à ne pas peindre les enfants comme de petits adultes, malgré leur pose et leurs lourds habits de fête, mais avec la spontanéité et la franchise propres à leur âge. Le Portrait de famille est construit clairement, avec une grande maîtrise du rendu de l’étoffe et un naturel surprenant dans le regard et les gestes. De Vos ne réalise pas d’études de caractère, mais demeure un spectateur réaliste et objectif. Le portrait de famille a aussi une signification moralisatrice. La pomme rouge fait référence à la fécondité et à l’éthique matrimoniale axée sur la procréation typique de la bourgeoisie du XVIIe siècle.

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Portrait de Liévin van Pottelsbergh, par Gerard Horenbout (1524). Il est probable que ces portraits dune famille de patriciens gantois constituent les volets latéraux d'un triptyque dont le panneau central a disparu. Le couple est représenté avec ses enfants. Les enfants tenant en main une petite croix sont déjà morts au moment de l'exécution du tableau. Derrière eux se trouve un ange gardien. |
Portrait de Livina van Steelant, par Gerard Horenbout (1524). Le miniaturiste et peintre sur bois gantois, Gérard Horenbout, à qui ces portraits sont attribués, travaille à la cour de Marguerite d'Autriche. Le naturalisme d'un extrême raffinement et la haute technicité rappellent l'œuvre de Gérard David. |
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Portrait d'une jeune femme, par Frans (I) Pourbus (1581).Outre des paysages et des portraits, Pourbus peint de préférence des scènes religieuses dans un style dynamique et italianisant. En tant que portraitiste, il se distingue par un raffinement exceptionnel dans le maniement du pinceau et une grande idéalisation de ses modèles. Il est considéré comme l'un de meilleurs portraitistes de sa génération. Ce portrait de 1581 est la dernière œuvre connue, signée et datée du maître. L'identité de la femme est inconnue. Elle est vêtue à la mode de la riche bourgeoisie de l'époque en velours noir orné de perles et soie blanche brochée de fils d'or. Sur la tête, elle porte un bonnet à barbes de dentelles blanc, son visage est élégamment encadré d'une fine collerette. |
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Le Fumeur, par Aelbert Jansz. van der Schoor (1655). L'homme au sourire entendu tient une pipe allumée dans sa main gauche, une volute de fumée s'échappant de sa bouche. Dans sa main droite, il tient une coupe légèrement penchée renversant quelques gouttes du liquide. Tant les calvinistes que les catholiques sont partagés sur le tabac et l'alcool, qu'ils considèrent trop « séduisants » et, partant, susceptibles de mener à la dégénérescence morale. Hier comme aujourd'hui, le comportement des autorités est ambivalent, l'alcool et le tabac étant soumis à une taxe. Ce tableau fait non seulement allusion à deux des cinq sens, le goût et l'odorat, mais aussi à la fugacité de la vie. |
La Glorification de Minerve, par Urbanus Leyniers (1717). En 1716, la Kasselrijhuis d’Oudburg à Gand commande une série de cinq tapisseries représentant la glorification des dieux. À l’époque, la Kasselrijhuis est une propriété du comté de Flandre, située à l’intérieur des remparts du Château des Comtes. Un an plus tard déjà, les tapisseries ornent les murs de la grande salle de réception.

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Les armoiries de l’Oudburg, un sabre avec une porte d’argent tenue par un lion, se trouvent dans le haut de chaque tapisserie, au milieu. Pendant la Révolution française, le Collège de l’Oudburg a été dissous et la Kasselrijhuis démolie. Après plusieurs péripéties, la série s’est vu offrir une place dans la salle d’honneur du Musée des Beaux-Arts en 1904. La Glorification de Minerve souligne, elle aussi, l’importance de la civilisation. Tout comme Apollon, Minerve est l’antithèse de Mars. Née de la tête de Jupiter, elle est la déesse de la sagesse, du savoir et de la paix. En tant que déesse combattante, elle fait régner la paix et protège la civilisation, ici représentée par plusieurs personnages allégoriques. |
La femme à côté d’elle, avec la corne d’abondance sous le bras, symbolise la Prospérité. Plus loin, nous apercevons l’Architecture, la Sculpture, la Peinture, la Science, la Poésie et la Musique. Tous viennent honorer Minerve. À l’avant-plan, deux putti détruisent du matériel de guerre, pendant que la Gloire annonce la victoire de Minerve au son du clairon : la raison l’emporte sur la violence insensée. À l’arrière-plan se trouvent un fermier qui laboure et un port. Ils représentent l’Agriculture et le Commerce. |
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Merveilleux également de maîtrise technique et de réaliseme, ce Portrait de deux hommes, exécuté par Jacob van Oost I |
Magnifique également, ce Portrait de Van Een Oude Vrouw, exécuté par Cornelis de Vos autour de 1638-1640. |
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La Lecture par Emile Verhaeren, par Théo van Rysselberghe (1903). Au cours d’une réunion imaginaire dans son appartement de Saint-Cloud, Emile Verhaeren lit des extraits de ses oeuvres. Le décor souligne le caractère artistique et littéraire de ce portrait de groupe: des rayonnages très fournis, une statuette d’Auguste Rodin, une reproduction du Portrait de Thomas Carlyle par James Abbott McNeill Whistler et un Agenouillé de George Minne. Le portrait de groupe est daté de 1903, mais les idées initiales de l’ambitieuse composition remontent à trois ans plus tôt. Van Rysselberghe a préparé son travail au moyen d’un certain nombre de dessins et peintures. La Lecture est un sommet de l’art du portrait et de la technique de composition déployés par Van Rysselberghe. De par le pinceau et la palette appuyés, son style s’affirme comme une variante personnelle du néo-impressionnisme. Le tableau se lit également comme un témoignage historique des liens culturels qui unissaient la France et la Belgique au tournant du siècle.

L'Escalier, par Paul Delvaux (1946). Sous l’influence de l’œuvre de Giorgio De Chirico, Paul Delvaux expérimente avec la perspective et les décors à partir de la moitié des années 1930. Dès cette période, ses œuvres illustrent régulièrement les mêmes motifs: des personnages inexpressifs figés dans des gestes théâtraux, des temples de l’Antiquité classique ou de la Renaissance, une perspective explicite et néanmoins complexe et baignant dans une lumière artificielle. Le décor peint dans des gris avec quelques rares accents de couleur, magnifie l’atmosphère d’une irréalité dont est empreint le tableau L’Escalier. L’ironie, pourtant caractéristique du surréalisme, est absente dans l’œuvre de Delvaux. Son art formel et en quelque sorte impassible, s’apparente plutôt au réalisme magique de l’artiste néerlandais Albert Carel Willink.

Idylle printanière, par Edward Atkinson Hornel (1905). L'artiste écossais Edward Atkinson Hornel étudie aux académies d'Edinburgh et d'Anvers et devient membre desdits Glasgow Boys, un groupe de peintres progressifs dont James Guthrie (salle S) fait également partie. Un voyage au Japon se traduira par une série de toiles ayant ce pays comme sujet, ainsi que par une approche plus graphique de la peinture. L'artiste renoncera cependant graduellement à la thématique orientale pour se consacrer à des motifs plus reconnaissables et plus accessibles au public écossais, de préférence des scènes montrant des enfants dans un cadre de verdure, peints généralement dans une palette aux teintes tendres, comme cette Idylle printanière.

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Portrait d'un cleptomane, de Théodore Géricault (1820). L'œuvre fait partie d'une série de dix portraits de fous, dont seuls cinq nous sont parvenus. L'artiste est à l'époque l'ami du médecin Étienne-Jean Georget, qui appartient à un groupe de médecins éclairés, les aliénistes. Ils ne considèrent plus la folie comme une punition divine, mais comme une maladie ou une déviance à traiter. Les aliénistes croyent que la physionomie du fou trahit sa déviance. Ils introduiront le terme de monomanie pour un trouble psychique qui s'exprime en une seule obsession précise ou une seule idée délirante. |
Dans leur analyse, ils exploitent tous les moyens possibles et imaginables pour reproduire les expressions: moulages, bustes, dessins et gravures. Géricault aura incontestablement subi leur influence. Ses portraits trahissent son intérêt presque scientifique pour les aliénés. Choses inhabituelles pour son temps: la dignité avec laquelle il représente l'aliéné et sa faculté romantique à se glisser dans l'esprit malade du patient. La méthode picturale souple et suggestive que Géricault utilise dans Portrait d'un cleptomane relativise le concept de tableau accompli et donne à l'œuvre une nouvelle valeur en tant qu'étude.


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